Communications / Ponencias > D. Larrouqué, L. Rivera - Le Front ample uruguayen

Le Front Ample en Uruguay (2005-2017): un parti social-démocrate non affecté par l’usure du pouvoir

por Damien Larrouqué, ATER à l’Université Paris 2 Panthéon-Assas, Docteur associé au CERI-Sciences Po, (damien.larrouque@sciencespo.fr) y Luis Rivera-Vélez, Doctorant au CERI-Sciences Po (luis.riveravelez@sciencespo.fr)

 

Résumé

Non concerné par les critiques adressées à la gauche latino-américaine, le gouvernement du Front Ample (FA) en Uruguay est aujourd’hui la seule expérience progressiste de la région à ne pas vivre une usure du pouvoir. La clé du succès uruguayen est double. D’une part, le FA a su combiner l’ouverture économique libérale, la régulation des marchés et l’augmentation des dépenses publiques, ce qui lui a permis de mettre en place des politiques publiques fondées sur les principes de justice sociale, solidarité, égalité des chances et lutte contre les inégalités. D’autre part, la gauche a su trouver sa place dans un système démocratique solide et a contribué à sa protection en défendant la transparence, la participation citoyenne, et le consensus comme principes de gouvernement. Ces deux caractéristiques sont celles de la social-démocratie, incarnée par un parti attrape-tout (catch-all), diversifié mais discipliné, qui conforte son appui citoyen dans les urnes et répond à leurs doléances exprimées dans la rue.

Mots clés : Uruguay, Front Ample, social-démocratie.

 

Abstract

Apart from criticism directed to the Latin American left, the Government of the Broad Front (FA) in Uruguay is today the only progressive experience of the region not to live a wear and tear of power. The key to Uruguay's success is twofold. On the one hand, the FA was able to combine liberal economic openness, market regulation and increased public spending, which enabled it to put in place public policies aimed at the population and based on the principles of social justice, solidarity, equal opportunities and the fight against inequalities. On the other hand, the left has found its place in a solid democratic system and has contributed to its protection by defending transparency, citizen participation and consensus as principles of government. These two characteristics are those of the social democracy, embodied in a catch-all party, diverse but disciplined, which finds citizen support in the polls and responds to citizen’s claims in the street.

Keywords: Uruguay, Broad Front, social democracy.

 

Introduction

En novembre 2014 et pour la troisième fois consécutive, le Front Ample (FA) emporte les élections présidentielles en Uruguay avec une majorité absolue dans les deux chambres parlementaires[1]. Son ascension électorale depuis le milieu des années 1990 et la victoire de son chef de file, Tabaré Vázquez, en octobre 2004 ont non seulement marqué ce fameux « virage à gauche » de l’Uruguay, mais surtout mis un terme à plus de 150 ans de bipartisme traditionnel[2]. Aujourd’hui, ce pays fait partie des rares de la région où les indicateurs économiques et sociaux, en dépit d’une conjoncture internationale morose, sont restés solides. Associés à la mise en place de politiques publiques « avant-gardistes » (dépénalisation de l’avortement, autorisation du mariage gay, légalisation du cannabis), ces bons résultats en matière de gestion macro-économique ont conforté la position désormais dominante du FA sur l’échiquier politique et réduit, par conséquent, les chances pour la droite de reconquérir le cœur des électeurs[3]. De fait, même après leurs premiers mandats respectifs, les côtes de popularité des deux présidents frenteamplistes, Tabaré Vázquez (2005-2010 ; 2015-2020) et José Mujica (2010-2015) demeurent élevées[4]. Et pour cause, leur exercice du pouvoir a échappé aux scandales de corruption comme à la tentation de la personnification, et a surtout renoué avec les principes d’inclusion et de solidarité qui ont forgé l’État-providence uruguayen au début du XXe siècle. En somme, après plus de douze ans à la tête de l’Etat – auxquels il convient d’ajouter les trois décennies de gestion municipale de Montevideo, capitale de plus de 1 300 000 habitants et qui concentre presque la moitié de la population uruguayenne–,  le FA n’a pas (ou de manière très marginale) été affecté par l’usure du pouvoir.

Proposant un bilan des trois gouvernements de gauche en Uruguay, cet article entend montrer que la clé du succès du FA a été de mettre en place une vraie politique social-démocrate, comme l’ont déjà soutenu deux célèbres politistes uruguayens[5]. La caractéristique des gouvernements socio-démocrates « tardifs » a été l’adoption simultanée des préceptes libéraux et des valeurs démocratiques[6]. Communément, le terme « socio-démocrate » qualifie les gouvernements et formations politiques adhérant à une idéologie réformiste de gauche. A propos de la social-démocratie « créole » ou latino-américaine, certains analystes soulignent le caractère institutionnalisé des partis qui la représentent (notamment du fait de leur stabilité dans le temps)[7]. Cependant, définir une idéologie politique à partir du degré d’institutionnalisation du parti qui lui est associé nous semble réducteur. Nous proposons d’étudier les avancés du FA en Uruguay au regard de deux caractéristiques qui définissent pour nous la social-démocratie incarnée par cette alliance d’une dizaine de groupes et mouvements de gauche: d’une part, l’adhésion à une forme d’orthodoxie libérale qui valorise la régulation économique et compense, dans le même temps, la remise en question des principes les plus radicaux du consensus de Washington, et d’autre part, la participation pleine et entière au jeu démocratique – ce qui signifie l’acceptation de ses règles élémentaires (élections concurrentielles, liberté de la presse, respect des opinions contestataires, etc.)

C’est donc sur deux points que la gauche latino-américaine modérée (ou social-démocrate) se différencie des autres types de gauche dans la région (populiste et national-populaire) et représente la véritable « nouveauté » en termes politiques : son internationalisation économique et son institutionnalisation démocratique[8].

Concernant le premier élément, il est certain que la gauche social-démocrate a, peu à peu, adhéré aux piliers de l’économie du marché, mais sans pour autant renier l’interventionnisme étatique. Ce point est à la fois la clé de son insertion internationale (et donc de sa stabilité économique) mais a aussi soulevé des critiques –notamment auprès des défenseurs du « post-néolibéralisme » qui l’accusent d’entretenir une relation ambigüe avec « l’impérialisme »[9].

Quant à son institutionnalisation, il s’agit là de la seconde clé du « succès » de la gauche modérée. Car, c’est dans la compétition électorale que cette dernière est parvenue à s’ancrer dans la société et à s’assurer une continuité dans le temps.  Cette logique démocratique est la plus valorisée pour certains analystes qui voient dans la gauche populiste la représentation d’un modèle « toujours autoritaire d’une manière ou d’une autre, et beaucoup plus intéressé par l’utilisation des politiques publiques comme instrument d’obtention et de conservation du pouvoir que par l’utilisation du pouvoir comme un outil de construction des politiques publiques » [10]. Dans tous les cas, la social-démocratie suppose, par définition, l’insertion dans un système pluriel et compétitif, impliquant des compromis.

Le succès du FA en Uruguay peut alors être étudié au regard de ces deux caractéristiques. Après avoir examiné le contexte d’ascension de la gauche au pouvoir, nous dresserons un bilan des politiques mises en œuvre pendant les premiers gouvernements de Vázquez et de Mujica, avant de finir sur une étude des facteurs contribuant à la consolidation de la gauche au pouvoir en Uruguay.  

Les raisons d’une victoire électorale

Le triomphe électoral d’octobre 2004, dès le premier tour, est venu clore magistralement un long processus de modération programmatique (ou de rapprochement vers le centre), initié au début des années 1990[11]. Ayant fait ses preuves en tant que maire de Montevideo (1990-1994), Tabaré Vázquez a réussi le tour de force de rallier à sa cause des personnalités aussi différentes que l’ancien guérillero tupamaro José Mujica, fondateur du Mouvement de participation populaire (MPP) classé à l’extrême-gauche et l’économiste Danilo Astori, chef de file de la formation Asamblea Uruguay plutôt positionnée au centre-gauche.Dans cette entreprise d’élargissement de sa base électorale, la conjoncture n’a pas été des plus défavorables pour le leader du FA. Bien au contraire, la crise économique et sociale de 2002 lui a ouvert une énorme « fenêtre d’opportunité politique » (policy window)[12].

En effet, déjà fragilisé par une détérioration conjoncturelle à partir de la fin des années 1990 (récession des pays voisins, détérioration des termes de l’échange, épisode de sécheresse et de fièvre aphteuse touchant l’agriculture), l’Uruguay est frappé de plein fouet par les conséquences de la crise de la dette souveraine argentine de décembre 2001. Du jour au lendemain, la classe moyenne porteña, qui avait pris l’habitude de venir déposer leurs épargnes dans le pays des Orientaux, alors réputé pour sa très grande opacité financière, accourt les retirer. Dirigé par le leader colorado Jorge Battle, le gouvernement de coalition laisse faire, au nom précisément de la doxa libérale autant que par incompétence macro-économique. Toujours est-il que la panique s’empare des Uruguayens qui, à leur tour, se ruent dans les guichets : 65 % des non-résidents et 30 % des résidents retirent leurs avoirs[13]. En moins de six mois, le pays a perdu plus de la moitié de ses actifs de réserve. Plusieurs banques font faillite. Rapidement, la contagion atteint l’économie réelle. Ainsi, à la crise financière succède une crise socio-économique d’ampleur inédite dans l’histoire du pays. Le taux de chômage atteint 17% en 2003, et un tiers de la population se retrouve sous le seuil de pauvreté l’année suivante[14].

Sur le plan politique, cette débâcle économique et ses graves conséquences sociales a eu pour effet de profondément délégitimer les deux partis traditionnels, apôtres de l’introduction des logiques néolibérales dans le pays[15]. Cet opprobre a particulièrement affecté le Parti colorado alors au pouvoir, au point d’envisager, à court terme, un processus de recomposition bipartisan au seul bénéfice du FA et du PN[16] ! En outre, ce contexte de grande détresse sociale a permis à la gauche de réhabiliter un discours interventionniste qui s’est d’autant plus facilement imposé durant la campagne de 2004, qu’il renouait avec l’attachement idiosyncrasique des Uruguayens à leur héritage institutionnel : celui d’un Etat historiquement fort et régulateur[17].

En somme, le programme politique de la gauche a séduit une majorité d’Uruguayens à partir d’une double promesse. Il s’agissait pour le FA de renforcer, d’une part, le lien entre les sphères politique et économique – c’est-à-dire de réimposer un contrôle accru de la première sur la seconde –, tout en prenant en compte, d’autre part, les demandes sociales d’une population qui subit alors l’effondrement des structures socio-économiques (banques, entreprises, mutuelles, etc.), après avoir déjà eu à supporter, durant les trente années précédentes, le lent et progressif délitement de l’État-providence. Plus qu’une remise en cause paradigmatique du néo-libéralisme, le FA prône (puis soutient) la régulation des marchés ainsi qu’une augmentation des dépenses publiques[18].

A l’instar d’autres pays d’Amérique latine, ce virage à gauche témoigne de l’exaspération d’une grande majorité de la population, qui s’était jusqu’alors montrée plutôt désabusée à l’égard de l’impéritie des gouvernements traditionnels comme des inégalités qui caractérisent à la région latino-américaine[19]. Au demeurant, même si l’arrivée du FA au pouvoir est le fruit d’un contexte spécifique et précisément favorable à l’alternance, les deux renouvellements consécutifs de la gauche uruguayenne correspondent à un vote de reconnaissance de la politique sociale-démocrate qu’elle a menée.

 

Bilan des politiques publiques des trois gouvernements du FA 

Sous l’égide du tout nouveau ministère du Développement social (MIDES)[20], l’agenda du FA s’est concentré, pendant les deux premières années de gouvernement, sur le Plan d’attention à l’urgence sociale (PANES). A partir de 2007, ce domaine d’intervention a été renforcé à travers des politiques structurelles de réduction des inégalités (accès au logement, extension de la couverture santé, réforme de l’éducation, etc.) menées au nom du principe d’équité (entre les générations, les territoires, les travailleurs et les sexes) et souvent formulées selon une modalité pragmatique d’hybridité (combinant mesures de protection entendues comme universelles et mesures d’assistance ciblées sur les groupes les plus vulnérables)[21]. En matière salariale, le FA a mis un terme au processus de dérégulation entamé dans les années 1990. Ainsi, ont été fondés dans chaque branche d’activités des conseils tripartites réunissant des membres du gouvernement, des syndicalistes et des chefs d’entreprises. Sous tutelle de l’État jusqu’en 2009, ces Consejos de Salarios ont permis d’aboutir à une revalorisation du salaire minimum de 25 % en 2011[22]. Les gouvernements frenteamplistes ont également mené une politique de réforme fiscale audacieuse, en mettant notamment en place l’impôt sur le revenu.

Sur le plan économique, le pays a non seulement réduit ses niveaux de déficit structurels, mais surtout assaini son système financier – ce qui lui a valu, en 2009, de sortir de la liste noire des paradis fiscaux établie par l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE)[23]. En résumé, pour Luis Bertolá, le FA a réussi à créer un climat de confiance et de stabilité propice au développement, « grâce à une gestion ordonnée de la dette externe, à sa diminution et à son refinancement, grâce également à une politique économique raisonnée, sans dérive vers des politiques populistes qui utiliseraient l’abondance économique pour faire exagérément croître l’endettement public » [24]. Cette responsabilité macro-économique conciliant libéralisation et régulation a pour finalité fondamentale d’assurer une croissance qui permette de financer la régénération de l’État-providence.

Nous l’avons vu, l’objectif principal des gouvernements de gauche a été de vaincre la pauvreté matérielle.  Mais, dans le même temps, pendant les trois quinquennats du FA, une volonté de réforme culturelle de la société a été impulsée tant par le gouvernement que par les acteurs sociaux, avec lesquels ce dernier a entretenu des relations ambiguës, souvent cordiales mais parfois également orageuses[25]. Quoi qu’il en soit, ces reformes ont permis de construire un nouveau référentiel de développement centré sur les droits.

Le président Vázquez s’est notamment penché sur l’épineuse question de la justice transitionnelle et a pris des mesures inédites en matière de santé publique comme de modernisation éducative. Ainsi, poursuivant les initiatives du gouvernement Batlle (2000-2005), Vázquez a commandé, lors de son premier mandat, une Enquête sur les détenus disparus pendant la dictature (1973-1985) et a réaffirmé son compromis envers cette cause en créant, à peine revenu au pouvoir en 2015, un Groupe de travail pour la vérité et la justice[26]. En termes de santé publique, ce cancérologue de formation a lancé une importante campagne contre la consommation de tabac et a mis en place une stricte réglementation[27]. En matière d’intégration sociale, il a aussi mis en place, entre 2007 et 2009, le fameux plan Ceibal, version uruguayenne du projet One Laptop Per Child, consistant en la distribution d’un ordinateur avec accès à internet à tous les élèves du primaire ainsi qu’à leurs professeurs[28]. Considérée comme un véritable succès institutionnel, cette politique d’inclusion digitale a été entendue, sous la présidence de Mujica, au niveau secondaire. Quant aux tablettes informatiques du plan Ibirapitá, elles s’adressent désormais aux retraités les plus modestes. 

Dans un autre registre, les gouvernements de gauche ont permis un élargissement des droits, impulsés par une société civile très active et soutenus par les parlementaires du FA. Les avancés sur les droits des femmes, de la population LGBT, des population afro et des consommateurs des drogues, constituent les reformes emblématiques de l’agenda des droits en Uruguay. Souvent décrites comme « avant-gardistes »[29], ces reformes sociétales ont donné une couleur progressiste au bilan du FA en Uruguay et lui ont assuré un support citoyen sur le long terme[30].

En bref, la gauche uruguayenne a consolidé son pouvoir auprès d’une grande partie de la population, tant parce que celle-ci a bénéficié directement des politiques publiques menées par le FA que parce que le parti est resté perméable à ses demandes. En quelque sorte, la gauche uruguayenne a changé la manière de concevoir la politique ; dans le sens où il ne s’agit plus d’une sphère éloignée de la société, mais d’un domaine d’interaction avec les pouvoirs publics à travers lequel celle-ci s’épanouit, se pense, et se fortifie elle-même. Cette institutionnalisation démocratique constitue l’un des facteurs fondamentaux de la pérennité gouvernementale du FA.

 

Les facteurs de la résistance frenteampliste face à l’usure du pouvoir

Les gouvernements du FA se sont caractérisés par une très grande popularité. Alors que Vázquez finissait son premier mandat avec un taux d’approbation de 54%, Mujica achevait le sien avec un niveau comparable de 52%[31]. Ces hauts niveaux de satisfaction populaire peuvent s’expliquent par le dynamisme économique recouvré, par l’absence de scandale (de type prévarication, népotisme ou corruption) ainsi que par un partage du pouvoir au sein du parti de gouvernement.

Sur le plan économique, la conjoncture uruguayenne est au beau fixe depuis 2007[32]. Malgré la crainte d’un impact probable de la récession brésilienne sur l’activité locale[33], la confiance macro-économique à l’égard de l’Uruguay demeure très solide. Dans son bilan de 2015, le Fonds monétaire international (FMI) a ainsi loué la « croissance inclusive » promue par les gouvernements frenteamplistes, laquelle a permis l’augmentation de 75% du revenu per capita depuis la crise de 2002et le maintient des dépenses étatiques élevées[34].

Au niveau institutionnel, la gestion transparente de l’État s’est affirmée sous les trois mandats de la gauche. Le FA a ainsi cherché à revaloriser la carrière administrative[35]. Quant à la réforme de l’État (au demeurant très difficile à mettre en œuvre), elle a été lancée au nom d’une meilleure efficacité des organismes publics[36]. Par ailleurs, les soupçons de corruption ont été très limités pendant les administrations du FA[37]. Dans les classements effectués par Transparency international, l’Uruguay se positionne toujours à la tête de la région latino-américaine[38].

Précisons enfin que le FA a toujours été exemplaire en matière de jeu démocratique. Même avec une majorité absolue au parlement, Vázquez et Mujica ont gouverné par consensus au sein de leur parti et n’ont pas prétendu concentrer le pouvoir autour de leur personne[39]. Pendant la campagne de 2004, le socialiste  Vázquez s’est positionné en tant que leader de tout la gauche, par opposition à l’ex-guerrillero Mujica qui a surtout été, cinq ans plus tard, le leader du mouvement majoritaire au sein du FA, le MPP. Toutefois, Mujica a joué le jeu de la modération en acceptant comme vice-président son principal opposant interne, le libéral Danilo Astori. De plus, tant Vázquez que Mujica ont formé leurs cabinets en convoquant, selon leur poids parlementaire respectif, les principaux dirigeants des différentes groupes partisans qui composent le FA. Dans le même temps, ils ont fait en sort de limiter les logiques clientélistes, en évitant qu’une seule faction contrôle un ministère en propre[40]. Ayant aspiré à « construire des espèces de tunnels hermétiques qui traversent les différentes présidences […] pour qu’à travers eux transitent les grandes lignes stratégiques des grands projets »[41], Mujica est allé même plus loin encore dans cette volonté de dépassement des clivages,  en renouant avec le principe de la coparticipation au bénéfice des deux partis traditionnels (nomination de membres de l’opposition dans les comités exécutifs d’agences, d’entreprises publiques, ou d’organismes décentralisés)   ainsi qu’en multipliant les accords interpartisans sur de grands enjeux de société (éducation, énergie, environnement, sécurité)[42].

Avant de conclure, il nous faut présenter un dernier élément susceptible d’expliquer la résistance du FA à l’usure du pouvoir. Cette caractéristique nous vient du caractère attrape-tout (catch-all) des partis politiques uruguayens, ainsi qu’ils ont été définis par Sartori[43]. En l’espèce, la profusion des listes et groupuscules qui composent le FA (une trentaine) et la diversité programmatique qu’il propose en conséquence, lui confèrent une plasticité inédite. L’éventail des tendances partisanes qu’il agrège permet au FA, en un certain sens, de contenter tous les électorats, d’embrasser plusieurs type de réformes distinctes, et donc de ne jamais nourrir d’insatisfactions trop grandes. Le dénominateur commun se fait autour des valeurs de gauche les plus consensuelles : la justice sociale, l’égalité des chances, la lutte contre les inégalités, la solidarité ou encore la foi dans la société civile. Ces principes élémentaires constituent néanmoins le solide socle politique qui fédère sympathisants, militants comme élus du FA. Cette convergence idéologique minimale permet de comprendre la facile conversion des volontés politiques en programmes d’action publique de nature très souvent transversale. Dans un tel contexte, on comprend également que la nécessaire discipline partisane au Congrès ne soit pas pour autant synonyme de béni-oui-oui présidentiel.  Pour preuve, durant le premier quinquennat de la gauche, le FA s’est farouchement opposé à Vázquez sur des enjeux clés, tels que la loi sur la légalisation de l’avortement[44] ou la signature d’un possible accord de libre échange avec les Etats-Unis[45]. Ces épisodes montrent qu’en Uruguay le parti l’importe sur la figure présidentielle qui, pour séduire, doit savoir se montrer aussi pragmatique et expérimenté que consensuel[46].

En bref, après avoir engagé sa mue programmatique à la fin des années 1990 et même absorbé les éléments les plus radicaux passés par la guérilla[47], la gauche uruguayenne s’est donc pleinement intégrée dans le jeu démocratique. Cette institutionnalisation l’érige comme modèle le plus pur de la social-démocratie en Amérique latine[48].

 

Conclusion

Après un moment de grande détresse sociale dans le pays, la gauche est arrivée au pouvoir en Uruguay à la fois comme une alternative crédible au modèle néolibéral mais aussi comme une solution de dernier recours face à une incapacité des partis politiques traditionnels à renouveler leurs programmes. Même si le legs néolibéral en Uruguay était limitée[49], la victoire électorale de 2004 marque ainsi le succès d’un long processus de modération et de rapprochement vers le centre, à travers lequel le FA a su défendre un équilibre précaire entre l’intégration uruguayenne à la globalisation et le renforcement des politiques sociales.

Inscrit dans le virage à gauche de l’Amérique Latine, l’Uruguay du FA a prôné la réhabilitation du rôle de l’État dans la promotion du développement et dans la lutte contre la pauvreté et les inégalités[50]. Or, la clé du succès uruguayen, qui a permis le dépassement du stade déclaratif, a été sa posture sociale-démocrate. D’une part, le libéralisme économique a été contrôlé par l’État et les richesses produites ont servi à l’augmentation des dépenses publiques en faveur de la réduction des inégalités. D’autre part, la foi démocratique de la gauche uruguayenne a renforcé le politique, dans le sens où le consensus et la participation citoyenne font désormais loi[51]

Malgré une certaine remise en cause du FA qui se manifeste, dernièrement, par la démission d’un parlementaire des rangs du parti[52], par la baisse de la popularité du président[53] et par un certain renouveau à droite[54] ; Uruguay reste le seul pays de la région où la population ne s’est pas manifestée ni dans les rues, ni dans les urnes, contre le gouvernement. Par conséquent, en Uruguay, le « post-progressisme »[55] (entendu comme la fin du virage à gauche) ne semble pas aux portes du pouvoir. 



[1] La majorité dans la Chambre de Députés a été perdue en décembre 2016, en raison de la sortie du député Gonzalo Mujica des rangs du FA. Cf. Article de Busqueda (hebdomadaire), publié la semaine du 15-21 décembre 2016 et intitulé : « Gonzalo Mujica, el diputado orgulloso de cambiar junto con ‘la realidad’ que le quitó las mayorías al Frente Amplio. »

[2] Depuis l’indépendance en 1830, deux forces politiques se disputent le pouvoir. Il s’agit du Parti blanco ou national, proche des élites rurales de l’intérieur du pays et libéral sur le plan économique, et du Parti colorado, traditionnellement plus au centre de l’échiquier politique mais qui a négocié un virage significatif vers la droite radicale au cours des dix dernières années. Pour une description plus détaillée, voir : Yaffé, Jaime, « Le système et les partis politiques après la victoire du Frente Amplio », Problèmes d'Amérique latine, n° 74, 2009 p. 37-62 & Larrouqué, Damien, « Du centre à la droite radicale : concurrence politique, tergiversations programmatiques et repositionnement idéologique du Parti colorado en Uruguay (1950-2015) », Amérique latine Histoire et Mémoire, Les Cahiers ALHIM, 2016, n°32.

[3] López Segrera, Francisco, América latina: crisis del posneoliberalismo y ascenso de la nueva derecha, Buenos Aires, CLASCO, 2016, p. 52-53.

[4] Selon une enquête d’Equipos Consultores de mars 2017, Mujica a un solde positif (sympathie – antipathie)  de 10% et Vázquez de 5% (enquête réalisée auprès de 696 personnes avec un marge d’erreur d’environ 3,7%). Cf. Article de El País du 21 mars 2017 intitulé « Mujica mantiene su popularida mientras Sendic continúa perdiendiendo » & Article de CIFRA du 29 mars 2017 intitulé « La popularidad de los líderes políticos hoy ».

[5]  Lanzaro, Jorge, « Uruguay : un gobierno social democrático en América Latina », Revista Uruguaya de Ciencia Política, 2010, vol. 19, n° 1, p. 45-68 & Luna, Juan Pablo, « Frente Amplio and the Crafting of a Social Democratic Alternative in Uruguay », Latin American Politics and Society,  2007, vol. 49, n° 4, p. 1-30.

[6] Depuis la fin du XIXe siècle le terme “social-démocrate” a servi pour caractériser certains groupes politiques et leurs pratiques de gouvernement. On parle de social-démocratie “tardive” pour se référer aux expériences de l’Espagne, du Portugal et de la Grèce, ainsi que celles du Chili, du Brésil et de l’Uruguay. Lánzaro, Jorge, « Introducción », in Lanzaro, Jorge (dir.), Social democracias “tardías”. Europa Meridional y América Latina, Madrid, CEPC, 2014, p. 1-31.

[7] Roberts, Kenneth, « ¿Es posible una socialdemocracia en América Latina? », Nueva Sociedad, nº 217, 2008, p.86-98 & Lanzaro, Jorge, « Uruguay : un gobierno social democrático en América Latina », op. cit, passim.

[8] Lanzaro, Jorge, « La ‘tercera ola’ de izquierdas latinomericanas: entre populismo y la social-democracia », Estudio/Working Paper, Universidad autónoma de Madrid, 2008, n°91, p.1-49.

[9] Katz, Claudio, Las disyuntivas de la izquierda en América Latina, Buenos Aires, Ed. Luxemburg, 2008, p. 50.

[10] Castañeda, Jorge, « Latin America’s Left Turn », Foreign Affairs, 2006, vol.3, n°85.

[11] Cette “déradicalisation” des discours comme des pratiques a été très largement étudiée. Voir notamment, par date de publication: Lanzaro, Jorge, « El Frente Amplio: un partido de coalición, entre la lógica de oposición y la lógica de gobierno », Revista Uruguaya de Ciencia Política, 2001, n° 12, p. 35-67 ; Garcé, Adolfo,  Yaffé, Jaime, La Era Progresista. El gobierno de izquierda en Uruguay : de las ideas a las políticas, Montevideo, Editorial Fin de Siglo, 2005 ; Yaffé, Jaime, Al centro y adentro. La renovación de la izquierda y el triunfo del Frente Amplio en Uruguay, Montevideo, Linardi y Risso, 2005 ; Garcé, Adolfo, Yaffé, Jaime, « La izquierda Uruguaya (1971-2004): ideología, estrategia y programa », America Latina Hoy, 2006, n° 44, p. 87-114 ; Moreira, Constanza, Entre la protesta y el compromiso: la izquierda en el gobierno, Montevideo, Ediciones Trilce, 2009 & Lorenzoni, Miguel, Pérez, Verónica, « Cambios y continuidades de la izquierda en uruguay : un análisis a partir de propuestas programáticas del Frente Amplio 1971-2009 », Revista Uruguaya de Ciencia Política, 2013, vol. 22, p. 181-102.

[12] Kingdon, John, Agenda, Alternatives and Public Policies, New York, Harper Collins, 1984, p.174 sqq.

[13] Antía, Fernando, « Uruguay 2002: contagio, crisis bancaria y perspectivas », Iconos. Revista de Ciencias Sociales, n° 15, 2002, p. 148.

[14] Olesker, Daniel, « Un modèle économique en mutation ? L'Uruguay dans le contexte économique régional et international », Problèmes d'Amérique latine, 2009, n°74, p. 65.

[15] Comme le rappelle Olivier Dabène, « la gauche a davantage profité d’un vote de sanction des expériences néolibérales que d’un vote d’adhésion à son projet ». Cf. Dabène, Olivier, « Introduction. La gauche latino-américaine en action », in Dabène, Olivier (dir.), La gauche en Amérique latine 1998-2012, Paris, Presses de Sciences Po, 2012, p. 17-18.

[16] Moreira, Constanza, « El voto moderno y el voto clasista revisado: explicando el desempeño electoral de la izquierda en las elecciones de 2004 en Uruguay », in Buquet, Daniel (ed.), Las claves del Cambio: ciclo electoral y nuevo gobierno 2004/2005, Montevideo, Ediciones de la Banda Oriental, 2005, p. 34.

[17] Comme l’écrit Franciso Panizza : « L’État uruguayen conserve une légitimité que d’autres États de la région ont complètement perdue : l’Uruguay est un pays doté d’une forte tradition étatiste, et son État, à l’inverse de nombreux autres États de la région, continue de jouir d’un prestige social relativement grand ». Cf. Panizza, Francisco, « Discurso e instituciones en la reforma de la administración pública uruguaya », Revista Uruguaya de Ciencia Política, 2002, vol. 13, p. 79.

[18] Buendía García, Luis, Sanabria Martín, Antonio. « Entre el cambio y la continuidad. El primer gobierno del Frente Amplio (2004-2011) », in Buendía García Luis et al. ¿ Alternativas al neoliberalismo en América latina ? Las políticas económicas en Venezuela, Brasil, Uruguay, Bolivia y Ecuador, Madrid, Fondo de Cultura Económica, 2013, p. 113-166.

[19] Filgueira, Fernando, « Los régimenes de bienestar en el ocaso de la modernización conservadora: posibilidades y límites de la ciudadanía social en América Latina », Revista uruguaya de Ciencia Política, 2013, vol, 22, n° 2, p. 17-46.

[20] Pour plus de renseignements sur son rôle, cf. Quiñones, Maria, Supervielle, Marcos, «  L’action sociale du gouvernement du Frente Amplio », Problèmes d’Amérique Latine, n° 74, 2009, p. 80-83.

[21] Pour plus de renseignements sur les politiques sociales du FA, voir par date de publication : Antía, Florencia, Midaglia, Carmen, « La izquierda en el gobierno : ¿Cambio o continuidad en las políticas sociales? », Revista Uruguaya de Ciencia Política, 2007, n°16, p.131-157 ; Castiglioni, Rossana, « Las políticas sociales de la nueva (vieja) izquierda uruguaya », Woodrow Wilson Center Update On the Americas, 2010, n°6, p.1-12 ; Serna, Miguel, « Pobreza y políticas de la pobreza : desafíos para la construcción de ciudadanía social en el Uruguay contemporáneo », in Serna, Miguel (dir.), Pobreza y (des)igualdad en Uruguay : una relación en debate, Montevideo, UdelaR/Clacso, 2010, p.135-141 ; Antía, Florencia, Midaglia, Carmen, « El sistema de bienestar uruguayo: entre la moderación liberal y la ampliación de la responsabilidad estatal en el área de la protección social », in Idiart, Alma (dir.), Estado benefactor y politicas sociales. Historia, implementación y reformas de programas sociales en Argentina, Chile y Uruguay, Buenos Aires, Editorial Biblos, 2011, p.21-48 ; Villegas Plá, María, « Pensadores y pobreza. El rol del conocimiento especializado en las políticas de lucha contra la pobreza en Uruguay », Revista Mexicana de Ciencias Políticas y Sociales, 2015, vol.60, n°224, p.71-102 & Lissidini, Alicia, « Uruguay : derechos y cambio social ¿ Un país de izquierda? », Nueva Sociedad,  2016, n°226, p.98-112. 

[22] Ibarra, Luis, « Más y mejores conflictos en Uruguay. Políticas de gobierno y autonomía de los trabajadores », Revista Enfoque : Ciencia Política y Administración Pública, 2011, vol.9, n°15, p.145.

[23] Cf. Communiqué de presse de l’OCDE publié le 3 avril 2009 et intitulé : « OECD welcomes Uruguay’s commitment to OECD tax information exchange standards ».

[24] Bértola, Luis, « Le cycle 1988-2002 dans l’économie uruguayenne : une croissance soutenue sans risque de déséquilibres ? », Cahiers des Amériques latines, 2014, n°77, p.136-137.

[25]  Delascote, Gabriel, « Los límites de la articulación : los movimientos sociales en el Uruguay frenteamplista », Revista Contrapunto, 2015, n°7, p. 13-25 & Rossel, Cecilia. « Te amo, te odio, dame más ». ONG, participación y representación en el primer gobierno de izquierda en Uruguay, Buenos Aires, CLASCO, 2013.

[26] Sur ce sujet, il y a une claire contradiction avec le président Mujica, qui par sa condition d’ancien guérillero a toujours revendiqué le droit à l’amnistie de tous les combattants. Pour plus de renseignement, cf. De Giorigi, Laura, « El Frente Amplio y su Laberinto », in Marchesi, Aldo (ed.), Ley de Caducidad, un tema inconcluso,  Montevideo, CSIC-Trilce, 2013, p. 61-102.

[27]  Cette offensive lui a d’ailleurs valu un litige contre le cigarettier Philip Morris que le pays a gagné en 2016 Cf. Article du Monde, publié le 9 juillet 2016 et intitulé « Victoire judiciaire de l’Uruguay sur le cigarettier Philip Morris ».

[28] Larrouqué, Damien, Le plan Ceibal en Uruguay: un exemple de bonne gouvernance ?, Paris, L’Harmattan, 2012 & Larrouqué, Damien, « La implementación del plan Ceibal: Coaliciones de causa y Nueva Gerencia Pública en Uruguay », Revista Uruguaya de Ciencia Política, vol.22, n°1, 2013, p.37-58. 

[29] Aguiar, Sebastián, Arocena, Felipe, “Menant la marche: l’Uruguay et ses trois lois avant-gardistes”, Cahiers des Amériques latines, n° 77, 2014, p. 69-86.

[30] Pour une étude sur le processus de construction de ces politiques publiques sous le gouvernement Mujica, voir : Rivera-Vélez, Luis, IVG, mariage égalitaire et cannabis en Uruguay : adoption de l’agenda des droits, Paris, L’Harmattan, 2016.

[31] Comparés aux mandats de leurs prédécesseurs, ces chiffres sont très élévés. Cf. Article d’El Observador, publié le 16 mai 2014 et intitulé « ¿Qué aprobación tuvieron los presidentes en su último año de gestión ? ».

[32] Pour plus de renseignements, cf. Bértola, Luis, op.cit, p.136 sqq.

[33] Article d’El País, publié le 23 mars 2017 et intitulé « Un panorama de moderado optimismo para la economía uruguaya en 2017 ».  

[34] International Monetary Fund, Uruguay, country report nº 15/81, publié en mars 2015, consulté le 17 mai 2017. URL: http://www.imf.org/external/pubs/ft/scr/2015/cr1581.pdf

[35] Narbondo, Pedro, « La aprobación legislativa del nuevo sistema de carrera de la Administracion Central »,  in Busquets, José Miguel (dir.),  Política en tiempos de Mujica (III) : a un año de las elecciones nacionales, Montevideo, Estuario Editora, 2013, p. 243-256 & Narbondo, Pedro, « Las tentativas y proyectos de reforma del sistema de gestión de los recursos humanos en Uruguay ¿ Nueva gestión pública o neoweberianismo? », Revista del CLAD Reforma y Democracia, n°61, 2015, p.177-208.

[36]  Narbondo, Pedro et al. « La reforma de la administración central : marchas, contramarchas y bloqueo », in Mancebo, Nardondo, Pedro (eds.) Reforma del Estado y políticas públicas de la Administración Vázquez : acumulaciones, conflictos y desafíos, Montevideo, Editorial Fin de Siglo, 2010, p. 27-53

[37] La plus grande menace est celle qui concerne le vice-président du deuxième mandat de Vázquez, Sendic, lors de sa gestión de l’ANCAP, la compagnie pétrolière uruguayenne. Toutefois, les résultats des enquêtes préliminaires n’ont pas encore permis de  l’inculper. Article d’El Observador, publié le 3 mars 2017 et intitulé « Abogado de Sendic translada responsabilidad al directorio de ANCAP».

[38] Selon l’indice de corruption de Transparence Internationale [en ligne] publié le 28 mars 2016, consulté le 17 mai 2017. URL: https://www.transparency.org/files/content/corruptionqas/Country_profile_Uruguay_2016.pdf

[39] Cette non-personnification du pouvoir est d’autant plus significative que les deux présidents peuvent s’enorgueillir d’un énorme charisme, notamment  Mujica qui a été la coqueluche des médias internationaux et des réseaux sociaux durant cinq ans. Cf. Lanzaro, Jorge, « El centro presidencial en Uruguay : 2005-2015 », Revista Uruguaya de Ciencia Política, 2016, vol. 25, n°2, p. 121-142 & Merklen, Denis, « José Mujica. Un homme politique au pouvoir », Cahiers des Amériques latines, 2014, n°77, p.27-48.

[40] Busquet, Daniel et al., « La desiganción de gabinetes en Uruguay : estrategia legislativa, jerarquía de los ministerios y afiliación partidaria de los ministros », América Latina Hoy, 2013, n°64, p. 15-40.

[41] Cf. Extrait du discours d’investiture du président José Mujica prononcé devant le Parlement, le 1er mars 2010.

[42]  Larrouqué, Damien, « Bilan des années Mujica en Uruguay. Un mandat inscrit dans la lignée de José Batlle y Ordoñez », Les Études du CERI, n°207-208, 2014,p.25-28.

[43] Sartori, Giovani, Partis et systèmes de partis : un cadre d’analyse [1976], Bruxelles, Éditions de l’université de Bruxelles, 2011, p. 119-124.

[44] Créant un profond tollé dans l’opinion, la décision d’y opposer son véto lui attirera une salve de critiques jusque dans les rangs de la droite modérée. Cf. Larrouqué, Damien, « Le véto présidentiel en Uruguay : une épée de Damoclès au dessus du Parlement », Journée Parlements et Politiques Publiques, Paris, Université Paris II Panthéon-Assas, 1er juin 2012, p.1-25.

[45] Dans ce dossier, le FA met un frein à toute velléité de négociation, car une telle proposition ne figurait pas sur l’agenda du parti et faisait l’unanimité contre elle. Cf. Porzecanski, Roberto, No voy en tren: Uruguay y las perspectivas de un TLC con Estados Unidos (2000-2010), Montevideo, Debate, 2010.

[46] Les figures montantes à l’intérieur du FA sont celles qui font preuve de capacités de gouvernement, comme l’actuel maire de Montevideo, Daniel Martinez, potentiel futur candidat du FA à la présidence. Celui-ci atteint aujourd’hui les pourcentages de sympathie de Vázquez et de Mujica. Cf. Article de Cifra, publié le 29 mars 2017 et intitulé « La popularidad de los líderes políticos hoy».

[47] Labrousse Alain, Les Tupamaros : des armes aux urnes, Monaco, Éditions du Rocher, 2009.

[48]  Lanzaro, Jorge, « Uruguay: A Social Democratic Governemnt in Latin America », in Levitsky, Steven et Roberts, Kenneth M. (eds.), The Resurgence of the Latin American Left, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 2011, p. 348-374.

[49] Comme le résume Pablo Alegre, "les dépenses sociales publiques ont augmenté au cours de la décennie [1990]; la réforme de l'éducation a adopté un profil étatiste clair; la réforme de la sécurité sociale a adopté une méthode peu orthodoxe qui combine des dispositifs du marché avec la participation de l'État; les principaux services publics (télécommunications, énergie) sont restés dans les mains de l'État; des programmes de stabilisation budgétaire se sont éloignés des chocs des stratégies dominantes dans la région ». Cf. Alegre, Pablo, « Democracia y reformas en el Uruguay : un caso de gradualismo perverso », Revista Uruguaya de Ciencia Política, 2008, vol. 17, nº1, p. 138.

[50] Ce projet politique a été cristallisé dans le « consensus de Buenos Aires » qui entendait supplanter le consensus de Washington dans la région. Ce document fut signé par Ignacio Lula et Nestor Kirchener le 16 octobre 2003. Cf. Dabène, Olivier, “Introduction”, in Dabène, Olivier (dir.), op. cit., p. 18.

[51] Face aux nombreux (et controversés) accords commerciaux qui ont été signés sous le mandat de Vázquez, le FA a demandé au président de consulter la population comme prérequis avant leur signature. Cf. Article d’El Observador, publié le 7 mai 2017 et intitulé « FA pide al gobierno consultar a la sociedad sobre pactos comerciales ».  

[52] Article d’El Observador, publié le 1 mars 2017 et intitulé « Por las banderas históricas, al Frente Amplio lo corren por la izquierda ».  

[53] Article d’El País, publié le 25 janvier 2017 et intitulé « La aprobación de la gestión del gobierno de Vázquez es de 28% ».  

[54] Article de Nueva Sociedad, publié en décembre 2016 et intitulé « Agustín Canzani : ‘En Uruguay hay una nueva derecha con la visión gerencialista de la política’ ».  

[55] Modonesi, Massimo; Syampa, Maristella, “Post-progresismo y horizontes emancipatorios en América Latina”, Blog Rebelión [en ligne] du 13 août 2016. Consulté le 17 mai 2017 et disponible sur: http://www.rebelion.org/noticia.php?id=215469 

Pour citer cette communication : Damien Larrouqué, Luis Rivera, "Le Front Ample en Uruguay (2005-2017): un parti social-démocrate non affecté par l’usure du pouvoir" in Colloque international "Gouvernements progressistes et postnéolibéralisme en Amérique Latine : la fin d’un « âge d’or » ?", Université Grenoble-alpes, juin 2017, URL : https://progresismos.sciencesconf.org/resource/page/id/33

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