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Le projet postnéolibéral du développement technoscientifique en Équateur : de l’illusion à la dystopie

par Henry Chávez (EHESS - Paris)

 

Résumé

Sur la base d’une étude historique sur le développement du champ technoscientifique en Équateur et ses rapports avec les cycles de transformation technoéconomique du système mondial, cette communication présente une analyse critique du projet de modernisation postnéolibérale mis en place en Équateur depuis 2007. Ce projet est matérialisé dans une série de programmes qui composent ce que les idéologues correistas ont appelé « le changement de la matrice productive » et  « révolution de la connaissance et des capacités ». Trois de ces programmes seront analysés : la réforme universitaire, le programme de bourses d’étude à l’étranger et le projet Yachay. Nous suggérons que les responsables de ces projets ont produit un processus de modernisation contradictoire basé sur une abstraction empirique adaptée à leurs besoins de légitimité politique. D’après cette abstraction, la cause de la croissance économique produite pendant cette période a été la reprise du rôle de l'État. Cependant, une fois l'illusion de la croissance économique disparue, cette reprise du rôle de l'État s’est objectivement traduite par une lourde bureaucratie, du gaspillage des ressources publiques et de l’autoritarisme. Nous concluons que ce processus fait partie d'une transformation générale du système mondial reflété dans la perte de l'hégémonie des États-Unis et la plus grande présence chinoise dans la région.

Mots clés : postnéolibéralisme, développement technoscientifique, éducation supérieure, formation internationale des élites, Yachay

Resumen : 

En base a un estudio histórico sobre el desarrollo del campo científico y tecnológico en Ecuador y los ciclos de transformación tecno-económica del sistema mundial, este artículo presenta un análisis crítico del proyecto de modernización postneoliberal implementado en Ecuador desde 2007. Dicho proyecto se encuentra materializado en una serie de reformas y programas que componen lo que los ideólogos correistas han denominado “el cambio de la matriz productiva” y “la revolución del conocimiento”. Esta presentación analizará tres de dichos programas: la reforma académica, el programa de becas en el extranjero y el proyecto Yachay. Nuestro argumento es que los responsables de dichos proyectos han generado un proceso de modernización contradictoria basado en una abstracción empírica adaptada a sus necesidades de legitimación política. Según dicha abstracción, la causa del crecimiento económico producido durante este periodo fue la recuperación del rol del Estado. Sin embargo, una vez que la ilusión del crecimiento económico ha desaparecido, esta recuperación del rol del Estado se ha traducido objetivamente en burocracia, despilfarro de recursos públicos y autoritarismo. Concluimos que este proceso es parte de una transformación mayor del sistema mundial reflejada en la perdida de hegemonía de los Estados Unidos y la mayor presencia china en la región.

Palabras clave: postneoliberalismo, desarrollo científico y tecnológico, educación superior, formación internacional de élites, Yachay

Abstract

Based on a historical study on the development of the scientific and technological fields in Ecuador and the cycles of techno-economic transformation of the world system, this article presents a critical analysis of the post-neoliberal modernization project implemented in Ecuador since 2007. This project is materialized in a series of reforms and programs that compose what “correist” ideologues have called "the change of the productive matrix" and "the revolution of knowledge." This presentation will analyze three of these projects: the academic reform, the scholarship program, and the Yachay project. Our argument is that the actors responsible for these projects have generated a process of contradictory modernization based on an empirical abstraction adapted to their needs of political legitimization. According to this abstraction, the cause of the economic growth produced during this period was the State’s role recovery. However, once the illusion of economic growth had disappeared, this recovery objectively translated into bureaucracy, waste of public resources and authoritarianism. We conclude that this process is part of a major transformation of the world system reflected in the loss of hegemony of the United States and the greater Chinese presence in the region.

Keywords: post-neoliberalism, scientific and technological development, university, international elite training, Yachay

 

Henry CHAVEZ, École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS), henry.chavez@ehess.fr

 

Introduction

Les dix dernières années ont marqué un point d’inflexion historique non seulement pour l’Équateur et l’Amérique latine, mais pour le système mondial tout entier. Quatre processus parallèles mais interconnectés rendent compte de cette rupture. Le premier est la crise des subprimes qui a plongé les États-Unis et d’autres pays européens dans une longue récession, dont certains ont encore du mal à sortir. Le deuxième est l’essor économique que connaissent les pays émergents, avec la Chine en tête, dont le dynamisme a été une des causes de la montée des prix des matières premières à l’échelle globale. Le troisième est la transformation techno-économique produite par l’émergence d’une deuxième génération d’innovations liées à l’informatique, le web, les réseaux sociaux, la gestion massive de données et les premières formes d’intelligence artificielle. Enfin, le quatrième processus est l’arrivée au pouvoir des gouvernements dits « progressistes » dans presque tous les pays sud-américains qui, sur la base d’un discours nationaliste et antinéolibéral, ont réussi à former un bloc latino-américain avec un certain degré de coordination politique.

Les transformations qui ont eu lieu en Équateur et en Amérique latine pendant cette décennie s’inscrivent donc dans ce processus de changement global. Il semble, en effet, difficile d’expliquer le développement économique et la stabilité politique que la plupart des pays latino-américains ont connu pendant cette période sans prendre en compte l’augmentation exponentielle des prix des matières premières, l’influence commerciale et financière de la Chine et le nouveau contexte techno-économique. Ces conditions ont permis aux gouvernements de ces pays de multiplier leurs recettes fiscales et de redonner à l'État le rôle que les réformes néolibérales de la période précédente avaient proscrit.

La forme et le contenu de ce nouveau projet « postnéolibéral » ont été différents selon les conjonctures politiques et économiques de chaque pays. En Équateur, par exemple, la forme de ce projet a évolué selon les différents plans qui ont guidé les actions du gouvernement de Correa pendant les dix dernières années [1]. Toutefois, deux éléments semblent maintenir le cap : d’une part, la réforme intégrale de l’État et ses institutions qui a commencé avec la rédaction d’une nouvelle constitution en 2008 et s’est prolongée jusqu’au dernier jour du gouvernement avec l’approbation d’une série de lois, voire de réformes de cette même constitution ; d’autre part, l’augmentation de la dépense et de l’endettement publics destinés notamment à la construction de mégaprojets d’infrastructures et à maintenir une clientèle politique. Tous les programmes, les actions et les politiques économiques, sociales, éducatives, sanitaires, etc. qui étaient censés donner du contenu à ce projet « postnéolibéral » ont fini par prendre une de ces deux formes.

Cette communication s’intéresse surtout à un des éléments de ce projet de modernisation : la politique de l’éducation supérieure, la science, la technologie et l’innovation. Cet intérêt se justifie par l’importance du développement technoscientifique non seulement pour son potentiel stratégique dans le processus de modernisation souhaité, mais surtout pour son rôle idéologique et politique. En effet, en se servant de l’illusion d’un possible développement technoscientifique local, le gouvernement a réussi à concentrer plus de pouvoir et cela s’est traduit par plus de bureaucratie, de gaspillage des ressources publiques et d’autoritarisme. Cette sorte de dystopie a-t-elle été en fin de compte le résultat de ce que les idéologues du « correisme » ont appelé un « mouvement hétérodoxe régional postnéolibéral » ? N’est-il pas plutôt le résultat d’une transformation systémique à l’échelle globale ? Enfin, quel rôle a joué le champ technoscientifique dans cette transformation ?

Afin de répondre ces questions, j’exposerai mes arguments en trois parties. D’abord, j’établirai mon cadre analytique fondé sur l’histoire des cycles économiques et leurs rapports avec les vagues de transformation techno-économique et les projets de modernisation à la périphérie. L’objectif de cette première partie sera donc de placer le projet postnéolibéral dans un contexte historique qui nous permet de distinguer les traits conjoncturels des structures de longue durée. Ensuite, j’examinerai trois des principaux projets qui ont fait partie de la stratégie équatorienne de développement technoscientifique pendant cette période: la réforme du système d’éducation supérieure, le programme de bourses d’études à l’étranger et le projet Yachay. Le but de cette analyse sera de mettre en évidence les contradictions et les limites de ces actions publiques et de dévoiler les enjeux idéologiques et politiques qui les ont façonnées. Enfin, je conclurai en analysant le rapport entre la mise en place de ces programmes et la transformation générale du système mondial reflété dans l’émergence d’une nouvelle transformation techno-économique à l’échelle mondiale et l’expansion de l’influence chinoise dans la région.

Les cycles de transformation techno-économique du système mondial et le développement technoscientifique en Équateur

Le modèle d’interprétation utilisé dans cette recherche a été développé à partir de certains éléments de l’anthropologie des systèmes mondiaux [2] et des hypothèses schumpétériennes et néoschumpétériennes sur le rapport entre les cycles économiques et technologiques [3]. Je me sers notamment du modèle des révolutions et paradigmes techno-économiques proposé par Carlota Perez [4] pour définir un schéma des cycles de transformation qui se sont succédé depuis le XVIIIe siècle jusqu’à nos jours (Graphique1).

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Graphique 1: Cycles de transformation technoéconomique (Élaboration : H. CHAVEZ)

 

Selon le modèle de Perez, cinq vagues de transformation techno-économique se sont succédés tout au long des trois derniers siècles, dont la dernière entre les années 1970 et 2010. Toutefois, à partir d’une analyse critique de ce modèle, je propose un schéma alternatif de six vagues de transformation basé sur deux hypothèses. La première est la différenciation d’au moins deux générations de technologiques informatiques. La première ayant eu lieu entre les années 1960 et 1980 autour de la microélectronique, de la popularisation des ordinateurs et des télécommunications (la cinquième vague). La seconde génération liée à la massification d’Internet depuis les années 1990 grâce à la création du web et le développement des applications, des réseaux sociaux, la gestion massive des données et les premières formes d’intelligence artificielle. Selon mon schéma, la crise de 2008 marque la transition entre la période d’installation et celle de déploiement d’un sixième cycle. Ma deuxième hypothèse suggère que l’apparition et le processus de diffusion de ces cycles ne sont ni homogènes ni synchroniques dans toutes les régions du système mondial. Par conséquent, les cycles dans les pays périphériques peuvent être décalés, voire inversés par rapport à ceux des centres hégémoniques dans chaque période historique.

Si l’on analyse l’histoire de l’Équateur [5] à la lumière de ce schéma, il s’avère que le rapport entre l’évolution du processus de reproduction locale et les cycles de transformation mondiale s’est intensifié à partir de la fin du XIXe siècle. Cela s’explique par l’accélération du processus d’intégration de ce pays périphérique aux circuits du commerce mondial. Il semble, en effet, que l’influence des différentes puissances hégémoniques dans chaque cycle a déterminé la forme d’intégration à ces circuits et les modèles techno-économiques mis en place localement. Cette influence a été à la fois techno-économique, politique et idéologique.

Quant à la sphère techno-économique, les données disponibles montrent que les cycles économiques locaux gardent un rapport inversé avec les cycles des centres hégémoniques (Graphique 2). Ainsi, pendant les quatre dernières crises structurelles du système mondial, l’Équateur a eu des périodes d’essor économique dont la fin a coïncidé avec la récupération des économies hégémoniques. Ce comportement à contretemps a très probablement été influencé aussi par l’adoption décalée des innovations technologiques associées à chaque cycle. En effet, lors de chaque période d’essor économique, les différents gouvernements ont essayé de mettre à jour l’infrastructure nationale selon les dernières conditions technologiques disponibles [6]. Cependant, à chaque fois, la fin de l’essor a laissé ces transformations inachevées et a reporté leur mise en place à la prochaine vague de transformation, renforçant ainsi le décalage entre les cycles périphériques et ceux des pays hégémoniques. Ce même décalage semble s’être répété lors de la dernière période de crise déclenchée en 2008.

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Graphique 2: Cycles économiques en Équateur et aux États-Unis : taux de croissance annuel du PIB, 1966-2016 (Source : BCE, Bureau of Economic Analysis US department of commerce , Élaboration : H. CHAVEZ)

 

L’influence de ces cycles se reflète aussi dans la sphère politique et idéologique. L’histoire du système d’éducation supérieure et son rôle dans le processus de production et reproduction des élites locales sont à cet égard un bon exemple [7]. En effet, cette histoire montre que l’Université est, depuis la période coloniale, le premier espace de dispute des élites qui dirigent le pays. Ces disputes ont pris toujours la forme d’une lutte intergénérationnelle entre les élites au pouvoir et les élites émergentes formées sous l’influence des idées et des paradigmes amenés par chaque nouveau cycle de transformation. D’ailleurs, ces disputes ont toujours commencé par des tentatives de réforme du système universitaire, qui sont ensuite devenues des projets politiques de modernisation générale pour toute la société (Graphique 3). Il y en a eu au moins six: le conservateur, le libéral, le capitaliste, le nationaliste, le néolibéral et le postnéolibéral [8]. Néanmoins, tous ces projets sont restés inachevés à cause des bouleversements économiques et politiques engendrés par la trajectoire cyclique des transformations mondiales.

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Graphique 3 : Équateur, universités par date de création, 1600-2015 (Source: Pacheco 2011, Elaboration : Henry Chavez)

 

Malgré l’influence de ces cycles, cette histoire montre aussi l’existence d’une certaine continuité structurelle [9] au sein de ce système d’éducation supérieure qui a toutefois persisté malgré les différentes tentatives de transformation et de réforme mises en place depuis ses origines au XVIIIe siècle. Les effets de cette continuité structurelle sont, par exemple, l’écart entre le nombre d’inscrits et le nombre de diplômés, la tendance séculaire du système à produire plus de fonctionnaires et de professionnels que d’ingénieurs et de chercheurs et d’autres pratiques d’ordre plus symbolique comme ce que j’appellerais le « culte » ou le « fétichisme » du diplôme. Tous ces phénomènes semblent produire et reproduire certaines structures du système universitaire qui persistent jusqu’à nos jours.  

Cette tendance explique non seulement les faibles capacités scientifiques, techniques et industrielles du pays, mais surtout la trajectoire de ses cycles politiques. En effet, si l’on observe les parcours des élites universitaires de chaque période, il s’avère qu’elles ont toutes eu un rôle central dans la conduite politique du pays et ses transformations. De ce fait, les contradictions entre les différentes factions qui les ont composées, ainsi que la dynamique démographique et les changements intergénérationnels sont très importants pour comprendre l’évolution idéologique et politique du pays.

Dérivé du même système universitaire, le champ technoscientifique équatorien a été façonné aussi par cette tension entre les cycles de transformation, les projets de modernisation ratés et les structures de longue durée. L’analyse du processus de formation de ce champ montre, en effet, comment la pensée et les pratiques scientifiques ont été implantées, hybridées et développées localement : d’abord, dans l’enseignement universitaire ; puis à travers les premiers noyaux de recherche ; et, plus tard, par des communautés et des publications scientifiques [10]. Ce processus a suivi plus ou moins les mêmes schémas d’internationalisation [11] et d’institutionnalisation [12] identifiés dans d’autres pays latino-américains, mais à un rythme beaucoup plus lent et moins dynamique. Ce manque de dynamisme s’explique par des facteurs démographiques et par l’échec cyclique des projets de modernisation des élites.

Tableau 1 : Les cycles de transformation techno-économique, les projets de modernisation périphérique et le processus de formation du champ techno-scientifique équatorien

Vague de transformation techno-économique

Projet de modernisation

Phase de développement techno-scientifique local

Internationalisation

Institutionnalisation

 

Révolution industrielle et machinisme

(1770-1830)

Independentisme (1770-1830)

Les expéditions et missions scientifiques étrangères

(1730-1920)

- Visites des missions scientifiques internationales

- Voyages et études d’Équatoriens à l’étranger

- Invitation de professeurs étrangers en Équateur

- Réformes de l’Université

- Première EPN

- Création de l’observatoire

- Études fondatrices dans différentes disciplines

- Développement de la médecine

 

L’âge de la vapeur et du chemin de fer

(1830-1870)

Conservatisme

(1830-1870)

 

L’âge de l’acier, l’électricité et l’ingénierie

(1870-1930)

Libéralisme

(1870-1930)

 

L’émergence des premières communautés scientifiques locales

(1920-1970)

 

L’âge du pétrole, la voiture et la production en masse

(1930-1970)

Capitalisme

(1930-1960)

- Missions d’exploration d’entreprises étrangères pour l’exploitation de ressources

- Voyages et études d’Équatoriens à l’étranger

- Invitation de professeurs étrangers en Équateur

- Missions des organisations internationales (CEPAL)

- Programmes de coopération scientifique internationaux

- Refondation de l’EPN et d’autres EP

- Diversification et multiplication  d’Universités et de champs d’études

- Création de la commission équatorienne sur l’énergie nucléaire

- Développement des premières communautés et associations scientifiques en médecine, biologie, chimie, mathématiques, économie, sociologie et histoire

 

Nationalisme

(1960-1980)

 

L’âge de l’informatique et des télécommunications

(1970-2000)

Vers l’institutionnalisation du champ techno-scientifique

(1970-2000)

- Études à l’étranger

- Professeurs étrangers

- Influence des organisations internationales (CEPAL, UNESCO, OEA, BID)

- Programmes de coopération scientifique avec des universités étrangères

- Organisations et instituts de recherche étrangers dans le pays (ex. IRD)

- Programme de bourses d’études à l’étranger

- Installation d’entreprises transnationales (ex. IBM, Tata, etc.)

- Réforme universitaire

- Création du CONACYT, puis SENACYT et du FUNDACYT

- Élaboration et mise en place des politiques de Sc et T

-  Premier programme de Sc et T

- Développement des communautés et associations scientifiques

- Réalisation de conférences et journées d’étude

- Développement éditorial (publications)

- Développement d’indicateurs de Sc et T

- Études sur l’état de lieux de la Sc et T

 

Néolibéralisme

(1980-2010)

 

L’âge d’internet, de l’IA, du big data, des réseaux sociaux, etc.

(2000-2040 ?)

Vers l’émergence d’un système local d’innovation

(2000-2020 ?)

- Programme de bourses d’études (SENESCYT et internationaux)

- Professeurs et chercheurs étrangers invités (réformes LOES et programme Prometheo)

- Programmes de coopération scientifique internationale

- Centres de recherche internationaux

- Programmes de recherche en association avec des universités étrangères

- Insertion des chercheurs équatoriens dans des réseaux internationaux de recherche

- Publications à l’étranger

- Yachay et Ikiam

- Coopération technique avec la Corée du Sud et la Chine

- Implantation d’entreprises chinoises

- Formation d’entreprises locales en association avec des capitaux chinois

- Réformes LOES, CEAACES, ENES, CES

- Transformation du SENACYT/FUNDACYT en SENESCYT

- Constitution de 2008

- Plans nationaux du développement

- Politiques de ScTI

- Les Plans nationaux de Sc et T

- Plans et programmes de recherche scientifique

- Financement public de la Sc et T

- Programme de bourses d’études à l‘étranger

- Programme Prometeo

- Création de Yachay et Ikiam

- Développement éditorial,

- Promotion de la publication

- Concours de financement de projets de recherche et de développement

- Soutien aux projets d’innovation

- Renforcement de laboratoires locaux

 

Postnéolibéralisme

(2010-2020 ?)

 

Élaboration : H. CHAVEZ

 

Le processus d’institutionnalisation de la politique technoscientifique commencé dans les années 1960, par exemple, n’a pas abouti, jusqu’à présent, à consolider un vrai système technoscientifique. Parmi les problèmes et les limites qui ont entravé ce processus se trouvent la faiblesse institutionnelle, l’instabilité politique, les financements insuffisants ou irréguliers, le manque de personnel qualifié, la méconnaissance du système technoscientifique local et, en général, la faible culture technoscientifique des citoyens et des décideurs politiques. L’absence d’un débat public et d’études systématiques sur ce sujet est à cet égard symptomatique. Le projet de développement technoscientifique mis en place par le gouvernement de Correa s’inscrit alors dans ce processus historique et contient, par conséquent, plusieurs de ses problèmes et ses limites.

Le projet postnéolibéral du développement technoscientifique

Depuis le début de sa carrière politique, lors de son passage par le Ministère de l’Économie en 2005, Correa a placé le sujet de l’éducation, de la science et de la technologie au centre de son discours. Au-delà de son contenu, cette utilisation de l’imaginaire technoscientifique a servi pour donner à son programme politique l’allure d’un projet scientifiquement conçu et techniquement mis en place. Ce programme, décrit dans les différentes versions du plan national de développement, devait enfin faire de l’Équateur un pays développé, capable de produire localement de la science, de la technologie, de l’innovation et des industries.

Ainsi, en appelant à la nécessité d’une « révolution de la connaissance et des capacités », dont l’objectif était de fournir un contingent de scientifiques, d’ingénieurs et de techniciens capables de mettre en place les transformations et les innovations technologiques nécessaires pour « changer la matrice productive » du pays, ils ont réussi à créer l’illusion d’une véritable transformation techno-économique [13]. En se servant de cette sorte de « techno-rêve » ils ont mis en place une série de réformes et de projets hétérogènes, voire contradictoires, dont les conséquences à long terme sont toujours incertaines.

Trois projets en particulier ont attiré mon attention par leur envergure et leurs possibles effets sur le développement technoscientifique et économique du pays : la réforme universitaire, le programme de bourses d’étude à l’étranger et le projet Yachay. Ces trois projets partagent plusieurs caractéristiques. Tous ont été conçus et dirigés par la même faction d’intellectuels organisés autour du Secrétariat national de l’enseignement supérieur, de la science et de la technologie (Senescyt). Les trois font partie de cette sorte de «techno-rêve » qui a renforcé la popularité du gouvernement et ses clientèles politiques, mais ils ont aussi été les principales cibles des critiques et des opposants. Enfin, à travers cette fonction commune de « techno-rêve », ils ont servi à accélérer le processus d’internationalisation du champ technoscientifique local et son intégration au processus de transformation techno-économique mondial.

La réforme universitaire

Malgré l’utilisation d’un discours centré sur l’éducation, la science et la technologie depuis 2005, Correa et ses collaborateurs ont négligé le problème de l’éducation supérieure jusqu’en 2008. Ce n’est qu’après avoir pris conscience de l’importance de la formation de la population pour soutenir leur projet de transformation économique, qu’ils ont redirigé leur attention sur l’Université et sa réforme [14].

Étant données les conditions défaillantes du système des universités publiques et privées du pays, cette transformation devait faire face à un défi assez compliqué : augmenter la capacité du système à absorber une population universitaire grandissante, tout en respectant l’autonomie des universités, en démocratisant l’accès et en améliorant la qualité de l’éducation. Ce quadruple défi a demandé des efforts politiques et financiers assez importants. D’une part, le gouvernement a dû entreprendre une série de réformes juridiques et institutionnelles visant à contrôler et à réguler le système [15]. D’autre part, ils ont dû augmenter les dépenses et les investissements publics afin de garantir l’accès, la gratuité, l’amélioration de l’infrastructure et la qualité des universités. L’augmentation de leur budget, la création de quatre nouvelles universités (Yachay, Ikiam, UniArtes et Uned), le programme de bourses d’études à l’étranger et le programme de professeurs et de chercheurs étrangers invités ont fait partie de ce processus. Or, malgré la propagande du gouvernement qui a utilisé tous ces programmes et politiques pour renforcer son image, leurs résultats sont contradictoires, voire décevants.

La réforme universitaire, par exemple, proposait, en théorie, un système plus transparent, ouvert, inclusif et égalitaire, contraire au processus de privatisation et d’internationalisation de l’éducation supérieure [16]. Cependant, dans la pratique, les acteurs qui ont dirigé sa mise en place ont fini par imposer un modèle de contrôle vertical du gouvernement sur les universités et des universités sur leurs membres qui n’a fait que renforcer l’élitisation, la rigidité, l’opacité, l’homogénéisation et l’adoption de modèles étrangers [17].

Cette contradiction dévoile l’utilisation idéologique de cette réforme afin d’accroître le contrôle du gouvernement précisément sur un des acteurs qui a historiquement été une des sources de contre-pouvoir. Ainsi, tout en prétendant éliminer le corporatisme caractéristique de l’Université équatorienne, cette concentration de pouvoir semble avoir produit une nouvelle forme de corporatisme qui risque de s’étendre bien au-delà du gouvernement correiste. En effet, le gouvernement a réussi à placer ses alliées comme recteurs dans plusieurs universités publiques et privées. Cette stratégie a échoué à l’Université Andine, ce qui a déclenché un conflit de presque deux ans entre les universitaires et le gouvernement et qui a mis en péril le fonctionnement même de cette université et d’autres comme la Faculté latino-américaine de sciences sociales (Flacso) [18].

Cette configuration d’un pouvoir vertical ancrée dans le paradigme technoindustriel du milieu du XXe siècle et les conflits engendrés par la dérive autoritaire du gouvernement ont entravé l’adaptation du système aux nouvelles conditions technoéconomiques que la transformation mondiale est en train de produire. Par ailleurs, la trajectoire des cycles économiques et politiques ouvre la possibilité de l’installation d’une nouvelle période de stagnation ou de dégradation du système universitaire qui pourrait amener une nouvelle crise et, très probablement, un nouveau cycle de réforme à moyen terme.

Il faut noter aussi que le processus d’internationalisation de l’éducation supérieure [19] qui se déploie à l’échelle globale et qui a été renforcé par cette réforme va très probablement configurer un système universitaire fragmenté avec, d’une part, certaines universités d’élite connectées aux réseaux technoscientifiques globaux et, d’autre part, des universités stagnantes et isolées. Cela pourrait creuser encore plus les différences sociales et entraver la diffusion locale du nouveau paradigme technoéconomique.

Enfin, les réformes introduites par ce projet de modernisation postnéolibérale ont renforcé cette sorte de « culte » ou « fétichisme » du diplôme qui a caractérisé le système d’éducation supérieure équatorien depuis ses origines et qui est à la base du processus de production et reproduction des élites locales. Toutefois, le processus d’internationalisation évoqué auparavant et l’accélération de la diffusion des innovations et des paradigmes d’organisation associés à la nouvelle vague de transformation globale, notamment dans le domaine éducatif et de la formation professionnelle, pourraient produire une transformation du rapport local à l’éducation supérieure, affaiblir le monopole universitaire sur la reproduction symbolique des élites et remettre en question la structure symbolique associée aux diplômes, à la reconnaissance sociale et à cette hiérarchie qui a été reproduite par le système universitaire équatorien pendant des siècles [20].

Le programme de bourses d’études à l’étranger

L’histoire de ce type dispositif dans le pays remonte au moins au XIXe siècle. En effet, sous différentes formes, les élites locales ont toujours envoyé leurs membres se former à l’étranger et cela a joué un rôle très important dans les transformations cycliques du pays. Toutefois, le nombre de bénéficiaires de bourses est resté réduit jusqu’en 2010. Le nouveau programme lancé par le Senescyt en 2011 a ouvert une nouvelle étape dans l’histoire de ces dispositifs et par conséquent dans la formation d’une nouvelle élite (Graphique 4).

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Graphique 4 : Nombre de boursiers financés par le gouvernement équatorien, 1995 –2016 et 2007- 2016 (Source : Archives de la FUNDACYT, du SENACYT et du SENESCYT, Élaboration : H. CHAVEZ)

 

Ce programme s’inscrit, en effet, dans le cadre de la réforme universitaire de 2010 selon laquelle à partir de 2017, au moins 60% des enseignants universitaires devraient posséder un diplôme de troisième cycle et où seuls les docteurs pourraient occuper un poste permanent et accéder aux positions de direction. Selon les données dont on dispose en 2009, un an avant la réforme, le système comptait 28 000 enseignants, dont seulement 360 avaient un doctorat (1,2%). Ainsi, pour atteindre leur objectif en 2017, le gouvernement devait financer au moins 2 500 bourses par an entre 2011 et 2016, ce qui explique l’envergure du programme.

Malgré les efforts réalisés par le gouvernement pendant les sept dernières années, les résultats de mon enquête suggèrent toutefois que cet objectif ne sera pas atteint. En effet, jusqu’en 2016, le groupe de boursiers de tous les programmes confondus depuis 1996 comptait un peu plus de 8 900 personnes. Si l’on exclut les bourses de coopération internationale, on compte à peu près 7 000 boursiers financés directement par le gouvernement équatorien. Ces chiffres contredisent la propagande du gouvernement selon laquelle ils avaient octroyé déjà 11 700 bourses [21]. Cela signifie que très probablement la loi des universités devra être réformée encore une fois en 2017.

Toutefois, vers 2020 le pays comptera bien au moins neuf mille diplômés à l’étranger, dont presque deux mille docteurs. Ce contingent de chercheurs deviendra dans les prochaines années la nouvelle élite qui prendra en charge la direction des universités, des centres de recherche et très probablement du gouvernement.

Les caractéristiques démographiques, sociales et économiques des boursiers montrent que cette nouvelle élite est relativement jeune, célibataire et équilibrée en termes de genre. Néanmoins, la plupart sont issus de la classe moyenne et aisée des principales villes du pays (Quito, Guayaquil, Cuenca et Loja) et ont fait leurs études de premier cycle dans des universités privées. Cela contredit aussi les principes d’équilibre géographique et social qui étaient censés guider ce programme. Il est très probable que le retour de ces boursiers renforce les écoles polytechniques publiques et quelques universités privées d’élite au détriment des universités de province. Si le processus d’internationalisation s’intensifie, il est plausible que le système universitaire évolue vers une intégration des universités de province avec les universités d’élite de ces quatre villes.

En outre, étant donné le nombre de boursiers, j’estime que la capacité de formation technoscientifique des universités équatoriennes augmentera d’au moins 60% dans la prochaine décennie. Toutefois, les nouvelles conditions économiques du pays pourraient compliquer la réinsertion de ces boursiers comme cela est déjà arrivé avec les boursiers des programmes précédents. Dans ce scénario, les boursiers vont sans doute chercher à intégrer le secteur privé ou à se lancer dans l’entrepreneuriat. Cette injection de personnel qualifié dans le système productif pourrait, en principe, déclencher une dynamisation de l’économie.

Le risque de fuite de cerveaux semble faible, en effet, en raison d’un certain sentiment patriotique très présent parmi la plupart des boursiers interviewés.

Enfin, indépendamment des effets économiques et politiques, le retour de ces boursiers aurait surtout un effet culturel d’ouverture vers l’extérieur. Étant donné leur position, il est fort probable que cela renforce le processus d’internationalisation des universités et du champ technoscientifique en général.

Le projet Yachay

Enfin, le cas de Yachay, la « ville de la connaissance », dont le but était de devenir le cœur de la transformation technoéconomique postnéolibérale, peut servir à décortiquer la fonction idéologique de tout ce projet politique. Ce projet a démarré en 2011, mais son exécution n’a commencé qu’en 2013 avec le soutien d’une équipe de conseillers coréens de l’IFEZ (Incheon Free Economic Zone). D’ailleurs, l’idée même du projet a été un produit d’exportation coréen conçu au pôle de recherche et de développement techno-industriel Innopolis Daedeok.

Le plan de la « ville de la connaissance », dont l’objectif était de devenir « le premier Hub de la connaissance en Amérique latine », comptait quatre zones de développement : connaissance, production industrielle, agrotourisme et biotechnologie [22]. Ainsi, sous la base du modèle de la triple hélice, la stratégie proposée par les experts coréens envisageait de déclencher un processus de développement et d’articulation des centres de recherche et de développement technologique, des entreprises high-tech et des institutions publiques autour d’une université de recherche scientifique et expérimentale. La création, la construction et le développement de cette université étaient, par conséquent, la première étape du projet. La deuxième prévoyait l’expansion de la ville par une augmentation de la population grâce à l’installation d’instituts publics de recherche (IPIs) et d’autres institutions publiques. Enfin, la troisième étape devait se concentrer sur l’articulation de la recherche scientifique, le développement technologique et l’industrie autour d’un centre d’innovation. L’investissement nécessaire pour compléter ce processus qui devait s’achever en 2017 était autour d’un milliard de dollars [23].

Une fois encore, malgré les efforts et la propagande du gouvernement ce projet n’a pas atteint ses objectifs. Après cinq ans de travail et 300 millions de dollars investis, Yachay est loin d’être achevé. Jusqu’au début de l’année 2017, seule l’Université était vraiment opérationnelle, et cela malgré une série de conflits de gestion laissant partir trois recteurs en trois ans. D’ailleurs, plusieurs chantiers d’infrastructure et l’acquisition d’équipement ont dû être suspendus à cause de la chute du prix du pétrole. Une deuxième zone dédiée à l’innovation était en travaux, mais elle accueillait déjà les fonctionnaires de l’entreprise publique Yachay et un FabLab, censée aider les entrepreneurs avec le « prototypage » de leurs innovations. Toutefois, se situant au milieu de la campagne à côté d’un petit village agricole et éloigné des grandes villes, le sens et l’utilité de ces installations ont été remis en question par plusieurs critiques du gouvernement [24].

Le besoin de légitimation politique du gouvernement et le manque de compétences et d’expérience des responsables du projet ont induit une stratégie centrée sur la propagande au lieu de résultats durables. Cela a produit une ambiance de suspicion et de rejet du projet, considéré par les critiques du gouvernement comme un « éléphant blanc ». D’ailleurs, l’inversion du cycle périphérique marqué par la chute du prix du pétrole fin 2014 et la crise qui a suivi a réduit considérablement les ressources disponibles pour ce projet. L’urgence des ressources pour maintenir l’illusion de ce « techno-rêve »  a poussé le gouvernement à demander à la Chine un crédit additionnel pour ce projet. Ce crédit a été conditionné par la participation de certaines entreprises chinoises dans la construction des infrastructures et l’approvisionnement des équipements. Les pratiques opaques autour de ces contrats ont soulevé plus d’une question parmi les critiques du projet [25]. Dans ces conditions, la viabilité future du projet reste incertaine.

L’analyse des controverses autour de ce projet montre que celui-ci est devenu une sorte d’appareil idéologique avec au moins trois fonctions : la reproduction matérielle et politique de l’élite locale au sein du gouvernement, la reproduction matérielle et symbolique d’une élite cosmopolite qui collabore avec le projet à l’étranger et surtout la reconfiguration de la sphère symbolique locale selon les nouvelles conditions de reproduction générale du système mondial.

La première fonction explique comment l’excédent produit lors de cette phase d’expansion du cycle économique périphérique a été utilisé par la nouvelle élite au gouvernement afin de produire et reproduire une nouvelle structure de pouvoir, en se servant pour cela d’une stratégie symbolique basée sur la propagande et la mobilisation d’un imaginaire de modernisation technoscientifique. D’ailleurs, les différentes critiques lancées contre le projet et cette élite peuvent être interprétées comme une forme de résistance locale au processus d’intégration périphérique du système technoscientifique mondial que ce projet a déclenché.

La deuxième fonction montre, ensuite, comment des experts « internationaux » se sont approprié aussi une partie de cet excédent en échange de leur nom et de leur prestige, grâce à un discours fondé sur le  cosmopolitisme, l’urgence et le volontarisme.

Enfin, la troisième fonction explique comment le projet Yachay a servi à véhiculer différents imaginaires autour de la technologie et de l’innovation dans la sphère idéologique locale grâce à l’influence des différents acteurs qui ont fait partie du projet : d’abord, les Coréens avec leur marketing technologique ; ensuite, les promoteurs du modèle californien et du nouveau paradigme technoéconomique qui étendent leurs réseaux autour du monde ; enfin, le capitalisme chinois, dont le pragmatisme a permis en fin de compte la continuité du projet après la crise de 2015.

À l’égard d’autres projets similaires qui sont apparus au même moment dans d’autres endroits du monde (Skolkovo et Innopolis en Russie, Masdar aux Émirats arabes, Konza en Kenya) ou les pépinières et les accélérateurs qui prolifèrent en Europe, aux États-Unis et en Asie, le projet Yachay fait partie d’un processus global de reconfiguration des conditions idéologiques et institutionnelles qui accompagnent le déploiement de la dernière vague de transformations technoéconomiques dans le système mondial.

Le postnéolibéralisme : au-delà de l’abstraction empirique

L’analyse de ces programmes dévoile que loin de la rigueur scientifique et technique qui était supposée soutenir le « projet de modernisation postnéolibérale » du correisme, il a été plutôt le résultat d’une série de discours et pratiques contradictoires. Ces contradictions semblent être le résultat de la façon dont ces plans furent élaborés et du réseau d’acteurs qui y ont participé. En effet, ce réseau était formé principalement par différents groupes d’intellectuels issus d’universités, d’associations, d’ONG et de mouvements sociaux qui ont essayé d’introduire leurs propres agendas dans ce projet politique. Entre leur quête idéologique d’un modèle de développement alternatif et la realpolitik imposée par le processus de reproduction systémique, ces acteurs ont ainsi fini par produire ce projet de modernisation contradictoire basé sur une « abstraction empirique » [26] adaptée à leurs besoins de légitimation politique. Cette abstraction consiste à interpréter le renouvellement du rôle de l’État et les réformes institutionnelles mises en place par leur gouvernement comme l’explication de l’essor économique produit pendant cette période. Pour ces acteurs, leur gouvernement faisait partie de ce « mouvement hétérodoxe régional postnéolibéral »[27].

Néanmoins, comme les faits l’ont montré, leur interprétation ne tient pas en dehors de cette période de transition cyclique. En effet, le renversement de la tendance des prix des matières premières depuis fin 2014 et le ralentissement de l’économie chinoise en 2015 ont marqué la fin de cette conjoncture et le début d’une nouvelle phase du cycle de reproduction globale. Les effets de ce changement sur l’économie et la politique régionale n’ont pas tardé et ont coûté l’hégémonie des partis au pouvoir au Venezuela, en Argentine et au Brésil. Pire encore, ce renouvellement du rôle de l’État s’est objectivement traduit par une accumulation de pouvoir, de bureaucratisation, de gaspillage des ressources publiques et d’autoritarisme [28]. Dans le cas équatorien, malgré la détérioration des finances publiques, la contraction de l’économie nationale, la perte de popularité du gouvernement et le renforcement de l’opposition, Alianza Pais, le parti de Correa, a gagné les dernières élections et a réussi à maintenir leur contrôle sur l’appareil étatique, en principe, jusqu’en 2021. Ce résultat s’explique en grande partie par le processus d’accumulation du pouvoir des dix dernières années.  

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que l’augmentation considérable de l’appareil d’état et la dépense publique dans toutes ses formes (investissement, services publics, éducation, santé, bureaucratie, corruption, etc.) n’a été possible que grâce à l’augmentation des prix des matières premières. Or, la tendance de ces prix n’a pas été décidée par les gouvernements latino-américains. Elle a été l’effet des transformations dans le processus de reproduction générale du système mondial signalé auparavant. En suivant Friedman [29], si ses transformations étaient le signe d’un changement d’hégémonie mondiale, très probablement cette renaissance des États et du régionalisme latino-américaine n’était que l’effet systémique du déclin du contrôle hégémonique des États-Unis sur sa périphérie et la montée de l’influence chinoise sur la région. Cette hypothèse s’avère d’autant plus pertinente dans le cas équatorien que la dépendance commerciale et financière avec la Chine s’est accrue exponentiellement précisément à partir de 2007 [30]. D’après cette perspective, le rôle joué par les gouvernements dits « progressistes », leurs politiques « hétérodoxes », leurs réformes institutionnelles et leurs projets « nationalistes » ou « révolutionnaires », dans la gestion de la crise et la reconstruction des États plus forts et autonomes n’est que relatif.

Dans le cas de l’Équateur, depuis que l’essor économique s’est achevé et que les problèmes budgétaires augmentent, il est de plus en plus évident que, sans la demande, les investissements, les prêts et les exportations chinoises, le projet correiste n’aurait pas survécu à la crise de 2008 [31]. Cependant, l’interprétation faite par les idéologues du correisme sur cette période néglige ce phénomène. Même s’ils sont conscients des enjeux géopolitiques des ressources naturelles de la région et de la dépendance croissante de la Chine, leurs fantasmes sur le « Socialisme du Buen Vivir »[32]  ou le « biosocialisme républicain »[33], la transformation technoéconomique du pays, l’intégration latino-américaine et leur imaginaire révolutionnaire semblent les empêcher de comprendre qu’ils sont enfermés dans un processus systémique beaucoup plus large et complexe que l’Équateur ou l’Amérique latine. Ce processus est historique, cyclique et observable dans les différentes vagues de modernisation ou de reconfiguration que l’État équatorien a suivies avec chaque vague de transformation technoéconomique mondiale et les enjeux géopolitiques associés. Dans cette nouvelle étape qui s’ouvre, les projets et le modèle utopiques proposés par les idéologues d’Alianza Pais montrent les limites de l’abstraction empirique sur laquelle ils ont basé leurs analyses. De ce fait, les possibilités de réalisation du programme du gouvernement s’amoindrissent et le futur du projet de transformation technoéconomique, toujours en attente, reste incertain.



[1] Alianza País, Plan de Gobierno del Movimiento Pais 2007-2011. Un primer gran paso para la transformación radical del Ecuador, Quito, Alianza Pais (Patria Altiva i Soberana), 2006. ; Senplades, Plan Nacional de Desarrollo 2007 - 2010, Quito, Secretaría Nacional de Planificación y Desarrollo (Senplades), 2007. ; Senplades, Plan Nacional de Desarrollo 2009-2013: Plan nacional para el buen vivir, construyendo un estado plurinacional e intercultural, Quito, Senplades, 2009. ; Alianza País, Plan de Gobierno del Movimiento Pais 2013-2017. Gobernar para profundizar el cambio, Quito, Alianza Pais, 2012. ; Senplades, Plan Nacional de Desarrollo 2013-2017: Plan nacional para el Buen vivir, todo el mundo mejor., Quito, Senplades, 2013.

[2] Ekholm F., Kajsa et Friedman, Jonathan, Historical transformations: the anthropology of global systems, Lanham, AltaMira Press, 2008. ; Friedman, Jonathan, « Marxist Theory and Systems of Total Reproduction Part I: Negative », Critique of Anthropology, 1976, vol. 2, no 7, p. 3–16.

[3] Schumpeter, Joseph A., Business Cycles: A Theoretical, Historical, and Statistical Analysis of the Capitalist Process”, Abridged., New York, McGraw-Hill, 1964. ; Schumpeter, Joseph A, Capitalism, socialism, and democracy, 5e éd., London; New York, Taylor & Francis e-Library, 2003, 460 p. ; Hospers, Gert-Jan, « Joseph Schumpeter and his legacy in innovation studies », Knowledge, Technology & Policy, 2005, vol. 18, no 3, p. 20–37. ; Nelson, Richard R., « Why Schumpeter has had so little influence on today’s main line economics, and why this may be changing », Journal of Evolutionary Economics, novembre 2012, vol. 22, no 5, p. 901‑916. ; Freeman, Christopher et Louçã, Francisco, As Time Goes by: From the Industrial Revolutions to the Information Revolution, Oxford, Oxford University Press, 2001, 424 p. ; Bengt-Åke Lundvall (ed.), National systems of innovation: towards a theory of innovation and interactive learning, London; New York, Pinter, 1992. ; Mensch, Gerhard, Stalemate in technology: innovations overcome the depression, Cambridge (MA), Ballinger, 1978.

[4] Pérez, Carlota, « Structural change and assimilation of new technologies in the economic and social systems », Futures, 1983, vol. 15, no 5, p. 357–375. ; Technological revolutions and financial capital, Cheltenham, Edward Elgar Publishing, 2002, 198 p. ; Revoluciones Tecnológicas y Capital Financiero: La dinámica de las grandes burbujas Financieras y las épocas de bonanza, México, Siglo XXI, 2004, 274 p. ; « Technological revolutions and techno-economic paradigms », Working papers in Technology governance and Economic Dynamics, 2009, no 20, p. 1‑26. ; « Technological Revolutions and the Role of Government in Unleashing Golden Ages » dans Leonid Grinin, Tessaleno Devezas et Andrey V. Korotayev (eds.), Kondratieff Waves: Dimensions and prospects at the dawn of the 21th century, Volgograd, Uchitel, 2012, p. ; « Un nuevo rumbo para la revolución tecnológica », América Latina en Movimiento - ALAI, septembre 2015, vol. 39, no 507, p. 11‑14.

[5] Acosta, Alberto, Breve historia económica del ecuador, 2e éd., Quito, Corporación Editora Nacional, 2001, 406 p. ; Ayala Mora, Enrique, Resumen de Historia del Ecuador, Quito, Corporación Editora Nacional, 1993. ; Bocco, Arnaldo, « Políticas estatales y ciclo económico » dans Louis Lefeber (ed.), Economía política del Ecuador, campo, región, nación, Quito, Corporación Editora Nacional, 1985, vol.6, p. 369‑404. ; Cepal, El desarrollo económico del Ecuador, Reedicción., México, Naciones Unidas; Ministerio Coordinador de Política Económica, 1954, 710 p. ; Torre, Carlos de la, La Seducción Velasquista, Quito, Ediciones Libri Mundi, Enrique Grosse-Luemern, Flacos - Sede Ecuador, 1993, 274 p. ; Deler, Jean-Paul, Genèse de l’espace équatorien: essai sur le territoire et la formation de l’État national, Lima, France, Institut français d’études andines, 1981, 279; xxiv p. ; Maiguashca, Juan, « El proceso de integración nacional en el Ecuador: el rol del poder central, 1830-1895 » dans Juan Maiguashca (ed.), Historia y Región en el Ecuador - 1830-1930, Quito, Corporación Editora Nacional, 1994, p. 355‑420. ; Carlos Marchán (ed.), Crisis y cambios de la economía ecuatoriana en los años veinte: ensayos conmemorativos por los sesenta años de fundación del Banco Central del Ecuador (BCE), Reedición., Quito, Ministerio Coordinador de Política Económica; BCE, 2013. ; Sepúlveda, Cristian, Farrell, Gilda et Fernández, Jorge, El proceso de industrialización ecuatoriano, Quito, Pontificia Universidad Católica del Ecuador, 1983, 306 p. ; Villavicencio, Fernando, Ecuador Made in China, 2e éd., Quito, Artes Gráficas Silva, 2013, 354 p.

[6] Saint-Geours, Yves, « La genèse de l’industrie en Équateur (1860-1914) », Bulletin de l’Institut Français d’Études Andines, 1984, vol. 13, no 3‑4, p. 21‑28. ; Nuñez Sánchez, Jorge, Cordero Íñiguez, Juan et Uyaguari Uyaguari, Fernando, Historia de las telecomunicaciones en el Ecuador, Quito, CNT; Academia Nacional de Historia, 2014, 201 p. ; Luna T., Milton, Orígenes de la política económica del desarrollo industrial del Ecuador 1900-1960, Quito, Ministerio Coordinador de Política Económica, 2013, 465 p. ; Villalobos, Fabio, La industrialización ecuatoriana y la utilización de los recursos productivos, Quito, Flacso - Cipiad, 1987, 148 p. ; C. Sepúlveda, G. Farrell et J. Fernández, El proceso de industrialización ecuatoriano, op. cit. ; Sáenz, Melio et Roldán, Rafael, « Informática e innovación: construyendo las histoiras del futuro », Historia de las ciencias en el Ecuador, Quito, Yachay; Academia Nacional de Historia del Ecuador, 2015.

[7] Pareja, Francisco, La educación superior en el Ecuador, Caracas, Cresalc - Unesco, 1986. ; Pacheco, Lucas, La Universidad Ecuatoriana. Crisis Académica y conflicto político, Quito, Ildis, 1992, 192 p. ; Historia de la universidad en el Ecuador: sus principales hitos, Quito, PUCE Facultad de Economía, 2011, vol.3, 352 p. ; Aguirre, Manuel Agustín, La Segunda Reforma Universitaria - Selección de documentos, Quito, Universidad Central del Ecuador, 1973. ; Arcos Cabrera, Carlos, La universidad ecuatoriana entre la endogamia y el corporativismo, Quito, IAEN, 2009. ; Ayala Mora, Enrique, La universidad ecuatoriana entre la renovación y el autoritarismo: aportes para la memoria y el debate, Quito, UASB: Fundación Hernán Malo: Corporación Editora Nacional, 2015, 204 p. ; Hurtado, Osvaldo, Crisis y reforma de la universidad ecuatoriana, Quito, FESO, 1992, 71 p. ; Minteguiaga, Analía, « Los vaivenes en la regulación y evaluación de la educación superior en Ecuador. El caso del mandato 14 en el contexto constituyente » dans René Ramírez G. (ed.), Transformar la universidad para transformar la sociedad, Quito, Senplades, 2010, vol.1, p. 83‑123. ; Ramírez G., René et Minteguiaga, Analía, « Transformaciones en la Educación Superior Ecuatoriana: Antecedentes y perspectivas futuras como consecuencias de la nueva constitución política », Educación Superior y Sociedad, 2010, vol. 15, no 1, p. 129–154. ; Ramírez G., René, Tercera ola de transformación de la educación superior en Ecuador. Hacia la constitucionalizacion de la sociedad del buen vivir, Quito, Senescyt, 2013. ; Villavicencio V., Arturo, De la Universidad funcional a la Universidad de la razón, Quito, UASB, 2013, 46 p.

[8] Chavez, Henry, « Dreaming of electric sheep » Les cycles techno-économiques du système mondial et le développement technoscientifique en Équateur : sources et limites du projet postnéolibéral ( 2007 – 2016 ), Thèse de doctorat, EHESS, Paris, 2017, 524 p.

[9] Gluckman, Max, « The Utility of the Equilibrium Model in the Study of Social Change », American Anthropologist, 1968, vol. 70, no 2, p. 219‑237.

[10] Sevilla Pérez, Elisa, Imperios informales y naciones poscoloniales : la autoridad de la ciencia, Tesis de Doctorado en Ciencias Sociales con mención en Estudios Políticos, Flacso -  sede Ecuador, Quito, 2011, 279 p. ; Fitzell, Jill et Muratorio, Blanca, « Teorizando la diferencia en los Andes del Ecuador: viajeros europeos, la ciencia del exotismo y las imágenes de los indios » dans Imágenes e imagineros. Representaciones de los indígenas ecuatorianos, siglo XIX y XX, Quito, Flacso - Sede Ecuador, 1994, p. 25‑73. ; Fitzell, Jill, « Cultural colonialism and new languages of power: scientific progress in nineteenth century Ecuador », Journal of historical sociology, 1996, vol. 9, no 3, p. 290–314. ; Renner, Susanne Sabine, A history of botanical exploration in Amazonian Ecuador, 1739-1988, Washington, D.C., Smithsonian Institution Press, 1993. ; Gustavo Pérez Ramírez (ed.), Historia de las ciencias en el Ecuador. Primer simposio Historia de las ciencias y el pensamiento científico en el Ecuador, Quito, Yachay; Academia Nacional de Historia del Ecuador, 2015.

[11] Kreimer, Pablo, « ¿Dependientes o integrados?: La ciencia latinoamericana y la nueva división internacional del trabajo », Nómadas, avril 2006, no 24, p. 199–212.

[12] Arellano Hernández, Antonio, Arvanitis, Rigas et Vinck, Dominique, « Circulation et connexité mondiale des savoirs: Éléments d’anthropologie des connaissances en Amérique latine », Revue d’anthropologie des connaissances, 2012, vol. 6, no 2, p. 245‑272.

[13] Alianza País, Plan de Gobierno del Movimiento Pais 2013-2017. Gobernar para profundizar el cambio, op. cit. ; Senplades, Buen vivir, op. cit.

[14] Minteguiaga, Analía, Informe diagnóstico sobre el sistema de educación superior en Ecuador, Quito, Senplades (inédito), 2008. ; Conea, Evaluación de Desempeño Institucional de las Universidades y Escuelas Politécnicas del Ecuador, Quito, Conea, 2009.

[15] Asamblea Nacional del Ecuador et Correa, Rafael, « Ley Orgánica de Educación Superior », 2010. ; CES, « Reglamento de carrera y escalafón del profesor e investigador del sistema de educacin superior.pdf », 2012, vol.RPC-SO-037. ; CEAACES, « Suspendida por falta de calidad » El cierre de catorce universidades en Ecuador, Quito, CEAACES, 2013.

[16] R. Ramírez G., Tercera ola de transformación de la educación superior en Ecuador. Hacia la constitucionalizacion de la sociedad del buen vivir, op. cit. ; René Ramírez G. (ed.), Transformar la universidad para transformar la sociedad, Quito, Senplades, 2010, vol.1, 254 p. ; R. Ramírez G. et A. Minteguiaga, « Transformaciones en la Educación Superior Ecuatoriana », art cit ; Minteguiaga, Analía et Prieto del Campo, Carlos, Los actores del cambio en la reinvención de la Universidad Ecuatoriana. El papel estratégico del personal académico en la transformación de la educación superior en Ecuador, 1re éd., Quito, IAEN, 2013, vol.2, 55 p.

[17] Arcos Cabrera, Carlos, « La autonomía como argumento político » dans René Ramírez G. (ed.), Transformar la universidad para transformar la sociedad, Quito, Senplades, 2010, vol.1, p. 57‑82. ; E. Ayala Mora, La universidad ecuatoriana entre la renovación y el autoritarismo: aportes para la memoria y el debate, op. cit. ; Granda A., Daniel, « El retorno del Estado autoritario en la educación superior del Ecuador », Ciencias Sociales. Revista de las Carreras de Sociología y de Política (UCE), 2013, no 35, p. 79‑121. ; A. Villavicencio V., De la Universidad funcional a la Universidad de la razón, op. cit. ; « ¿Hacia dónde va el proyecto universitario de la revolución ciudadana? », UASB Digital, 2013, p. 25. ; « Universidad, conocimiento y economía », Ciencias Sociales. Revista de las Carreras de Sociología y de Política (UCE), 2013, no 35, p. 13‑51. ; Dávalos, Pablo, De Amawtas y Philosophiae Doctor (PhD) [En ligne], 23 avril 2013, consulté le 25 août 2014. URL : http://lalineadefuego.info/2013/04/23/de-amawtas-y-philosophiae-doctor-phd-por-pablo-davalos/

[18] Plan V, « La Universidad Andina: ¿un nuevo escenario de la lucha Gobierno-oposición? », Plan V, 26 oct. 2015. ; Plan V, « La pugna por el rectorado de la Universidad Andina se intensifica », Plan V, 1 août 2016. ; Avila, Ramiro, « La inconstitucional ley que extingue a las universidades », Plan V, 16 janv. 2017.

[19] Rama V., Claudio, « La tercera reforma de la educación superior en América Latina y el Caribe: masificación, regulaciones e internacionalización », Revista Educación y Pedagogía, 2006, vol. 18, no 46, p. 11‑24.

[20] Torres M., Ana, « Entrevista a David Roberts: “La mayoría de universidades del mundo van a desaparecer” », El País, 24 oct. 2016. ; Open University, Innovating pedagogy 2015, Milton Keynes, The Open University, 2015.

[21] Macías, Viviana, ¡Becarios de la esperanza!, la respuesta a Walter Spurrier [En ligne], 22 janvier 2016, consulté le 27 janvier 2016. URL : http://www.elciudadano.gob.ec/becarios-de-la-esperanza-la-respuesta-a-walter-spurrier/ ; El Telégrafo, « Ocho de cada 10 becarios que han retornado a Ecuador tienen menos de 35 años », El Telégrafo, 11 févr. 2016.

[22] Senplades, « Yachay: ciudad del conocimiento », Quito, 2011.

[23] Yachay, Yachay: Plan metropolitano de desarrollo, Urcuqui, Yachay EP, 2013. ; Yachay, Informe de gestión: abril-diciembre 2013, Urcuqui, Yachay EP, 2013.

[24] Villavicencio V., Arturo, Innovación, matriz productiva y universidad. Por qué Yachay es una estrategia equivocada, 1re éd., Quito, Corporación Editora Nacional: Fundación Hernan Malo, 2014, vol.8, 261 p. ; « La nano-alfalfa y el cambio de la matriz productiva: más verdades sobre Yachay », Plan V, 24 sept. 2015. ; Bucaram, Santiago, Un refrigerador llamado Yachay [En ligne], 4 août 2015, consulté le 4 août 2015. URL : http://www.larepublica.ec/blog/opinion/2015/08/04/un-refrigerador-llamado-Yachay/ ; Purcell, Thomas F., Fernandez, Nora et Martinez, Estefania, « Rents, knowledge and neo-structuralism: transforming the productive matrix in Ecuador », Third World Quarterly, 26 avril 2016, p. 1‑21.

[25] Aguilar, Roberto, Yachay, la universidad que produce… sobreprecios [En ligne], 8 août 2016, consulté le 8 août 2016. URL : http://4pelagatos.com/2016/08/08/Yachay-la-universidad-que-produce-sobreprecios/ ; 4pelagatos, ¿Sobreprecios? Así mismo es, responde Yachay – 4pelagatos [En ligne], 10 août 2016, consulté le 11 août 2016. URL : http://4pelagatos.com/2016/08/10/sobreprecios-asi-mismo-es-responde-Yachay/

[26] Friedman, Jonathan, « Crises in Theory and Transformations of the World Economy », Review (Fernand Braudel Center), 1978, vol. 2, no 2, p. 131‑146.

[27] Senplades, Buen vivir, op. cit.

[28] Dávalos, Pablo, La democracia disciplinaria. El proyecto posneoliberal para América Latina, 1re éd., Quito, CODEU, 2010. ; Dávalos, Pablo, Alianza País o la reinvención del poder. Siete Ensayos sobre el posneoliberalismo en el Ecuador, Bogotá, Desde abajo, 2014, 402 p.

[29] Friedman, Jonathan, « Holism and the Transformation of the Contemporary Global Order » dans Ton Otto et Nils Bubandt (eds.), Experiments in Holism: Theory and Practice in Contemporary Anthropology, Chichester, West Sussex ; Malden, MA, Wiley-Blackwell, 2010, p. 227‑248.

[30] OEC, Import origins of Ecuador (2015) [En ligne], 2016, consulté le 4 juin 2017. URL : http://atlas.media.mit.edu/en/visualize/tree_map/hs92/export/ecu/show/all/2015/ ; Export destinations of Ecuador (2015) [En ligne], 2016, consulté le 4 juin 2017. URL : http://atlas.media.mit.edu/en/visualize/tree_map/hs92/import/ecu/show/all/2015/

[31] Noyola R., Ulises, « TPP, la guerra económica entre Asia y Latinoamérica », América Latina en Movimiento - ALAI, 13 nov. 2015. ; Humire, Joseph M., Menéndez, Fernando et Cordero, Juan, Anti-dollar alliance: Russia, China & Ecuador advance against the global dominance of the U.S. dollar, Washington, D.C., SFS - Center for a Secure Free Society, 2015. ; Gandásegui, Marco A., « El expreso chino en América Latina », América Latina en Movimiento - ALAI, 11 juin 2015. ; Ray, Rebecca et al., China in Latin America: lessons for South-South Cooperation and Sustainable Development, Boston, Boston University; Centro de Investigación para la Transformación, Tufts University, Universidad del Pacífico, 2015. ; F. Villavicencio, Ecuador Made in China, op. cit. ; Chicaiza, Gloria, Mineras Chinas en Ecuador Nueva Dependencia, Quito, Accción Ecológica, 2014.

[32] Senplades, Buen vivir, op. cit.

[33] Ramírez G., René, Socialismo del Sumak Kawsay o biosocialismo republicano, Quito, SENESCYT, 2012.

 

Pour citer cette communication : Henry Chávez, "Le projet postnéolibéral du développement technoscientifique en Équateur : de l’illusion à la dystopie" in Colloque international "Gouvernements progressistes et postnéolibéralisme en Amérique Latine : la fin d’un « âge d’or » ?", Université Grenoble-Alpes, juin 2017, URL : https://progresismos.sciencesconf.org/resource/page/id/27 

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